Lamproie de Roi
Chez une Reine
Ce vertébré migrateur remonte les fleuves pour s’y reproduire et meurt,
Avec sa morphologie d’anguille à nageoire dorsale et caudale,
Sa gueule à ventouse aux pointes cornées en fait un parasite suceur,
Ce vampire se nourrit du sang des cétacés, espadons, morues ou poisson alluvial.
L’espèce est à nouveau abondante en Dordogne et Garonne,
Véritable fossile vivant, ce cyclostome né en rivière, parti grandir en mer,
Au bout de cinq ans revient sur son lieu de naissance si cher,
La lamproie y pond et le plus souvent meurt dans la foulée en zone.
Abondante entre mars et avril, la « Madeleine de Proust » des bordelais,
Se pêche au tramail, filet dérivant avec le bateau,
Ou au « loup », filet à quenouilles, resserré quand le poisson est entré,
Les braconniers préférant la pêche de nuit à la lumière du falot.
Du côté de Pujols sur Ciron, un pêcheur professionnel renommé,
Racontait récemment avoir capturé un demi quintal en quelques coups de filets,
Mais en dix ans le prix de l’animal, de vingt à dix euros a dégringolé,
Pour ce poisson du fond des âges à la chair délicate et à la peau marbrée.
Bête serpentifore, parfois ne pouvant franchir une rampe escarpée,
Cachée sous une pierre ou une branche, patiente pour se faire transporter,
Quand une alose passe, par sa ventouse elle saisit sa queue déployée,
Le poisson effrayé décuplant son effort pour entraîner la lamproie soulagée.
Dans la Rome antique, on qualifiait ce poisson de « un manger admirable »
Dans le Vexin normand, proche des Andelys, à Lyons la Forêt
On se souvient du roi Henri 1er d’Angleterre qui après une ripaille mémorable,
Mourut d’une forte indigestion de lamproies grillées.
Si vous passez en bordelais en avril, Sainte Terre joue musette et flons-flons
Au bord de la Dordogne, entre Castillon la Bataille et St Émillion,
La Capitale de la lamproie fait la fête en chansons,
On y déguste l’emblème goûteux et juteux de son blason.
Mais allez surtout en terre médocaine, entre Pauillac célèbre par la Victoire,
Goélette du Marquis de La Fayette appareillant pour les Amériques,
Et Margaux au « premier grand cru classé » de vieille mémoire,
C’est chez Christine et Guy, à Beychevelle, que la lamproie est fantastique
A l’ancienne, la lamproie à la bordelaise se servait sur son lit de poireaux,
Avec des croûtons de pain de campagne frottés d’ail et rissolés à la graisse,
Aux Beychevelloises, après flambage au Cognac et marinade de vin de presse,
On patiente deux ans pour servir ce plat délicieux avec un bon Bordeaux.
Point de soucis d’alcoolémie, ici on mange et on dort
Chambres d’hôtes étoilées, après le repas du soir le sommeil est en or
Pour le lendemain au petit déjeuner c’est confiture maison et viennoiseries
Prêts pour la découverte des grands châteaux et de la winerie.
L’ARIÉ….JOIE