M A I, mois enchanté
En ce mois de Mai parfumé l’aurore décore les toiles d’araignées de perles de rosée,
Les petits lutins à plumes sifflent joyeusement dans les ramées,
Dans leurs habits de lumière les papillons virevoltent tels des feux follets,
Féérie de la nature, les nymphes sylvestres se coiffent des clochettes du muguet.
Sur le banc d’Argain arcachonnais les sternes caugek dansent leur parade nuptiale,
Un poisson au bec, calotte noire prolongée d’une huppe sur la nuque, tournoie le mâle,
La femelle séduite par cette invitation au bal se lance dans d’impressionnants piqués,
En cadeau, Monsieur conclut son idylle en offrant sa capture à sa bien aimée.
Au-dessus des terres cultivées, des landes et des friches, l’alouette des champs gazouille,
D’un vol vertical elle s’élève en grisollant tout en paillonnant d’un vol stationnaire,
Comme suspendue à un fil elle domine son territoire pour le défendre en mercenaire,
Curieuse, elle se laisse hypnotiser par le miroir des chasseurs sans trouille.
Poussant dans les sites rocheux ou incultes et aux abords des bois clairs ariégeois,
Les biscutelles communes ou lunetières doivent leur nom à leurs fruits à la drôle de binette,
Des silicules aplaties à bord ailé et membraneux faisant penser à des paires de lunettes,
Leurs fleurs jaunes, groupées en racèmes, comportent quatre pétales disposés en croix.
La potentille du printemps, aussi belle qu’un petit buisson de rosier,
Joue de son charme en dressant ses petites fleurs délicates, jaune ou rouge soutenu,
Elles se détachent du feuillage élégamment découpé à l’aspect soyeux et argenté,
Surplombée parfois par les ramifications du feuillage de l’asperge à feuilles ténues.
Au détour d’une clairière, dans les sous-bois éclairés ou le long des haies en dentelles,
Attention à la rencontre de cette altière aux clochettes violettes attirant le regard,
Celle que l’on surnomme « herbe du diable » peut être fatale par ses fruits rondouillards,
Les baies noires et rondes comme des cerises de la belladone renferment l’atropine mortelle.
Semblable au geai, diantre qu’il est beau dans son plumage tissé dans l’étoffe des cieux,
Tête au bleu persan, ailes turquoise, tout est bleu hormis le dos brun tabac palot,
Le rollier d’Europe perché sur sa branche plonge sur une sauterelle, emportée illico,
Dans un trou d’un arbre où sa femelle couve les cinq œufs pondus il y a peu.
Lui aussi navigue dans le bleu, voletant dans les prairies, les friches et les jardins,
L’argus bleu, ou azuré commun, cherche sur une fleur de trèfle sa compagne posée,
Le mâle se reconnait par son dessus des ailes de couleur bleu irisé,
Alors que chez la femelle il est marron, serti par des points rouges grenadin.
Fruits des amours hivernales, les bébés marcassins trépignent d’impatience,
Bien au chaud dans le chaudron de la laie la ribambelle de petits veut sortir un à un,
Encore habillés de leur pyjama, couleur café au lait zébré de crème en élégance,
Ils se camouflent dans les futaies avant de se revêtir adulte, de leur pelage brun.
Sa floraison magique enchante haies et sous-bois, l’aubépine blanche est annoncée,
Ses fleurs blanches ou rosées, ouvrent leurs corolles sous le couvert des épines acérées,
Leur parfum légèrement amandé attire les butineuses frétillant sur ces bouquets neigeux,
La légende celte précisant que les fées aussi en auraient fait leur royaume piégeux !
Tout proche sur l’empire des ondes, posées sur une feuille de nénuphar ou sur une tige,
On confond souvent la libellule et la demoiselle, deux insectes à l’allure frêle en voltige,
La première à un vol puissant évoquant un hélicoptère, l’autre est plus hésitante, nymphéene,
Au repos la libellule garde ses ailes écartées, la demoiselle les replie au-dessus de l’abdomen.
Dans le jardin parfumé de rose et de lilas quand le jour chavire, laissant la place à la nuit,
Un étrange grésillement s’élève du potager alors que le rossignol salue par ses trilles le soir,
Ce chant trahit la présence de la courtilière, cousine du grillon elle passe son temps enfouie,
Sauf en mai où le mâle chante en frottant ses ailes pour attirer une belle dans son dortoir.
Dans les zones cultivées, plaines et coteaux se transforment en papier damassé,
Avec le jaune moutarde du colza, le vert pistache de l’orge ou le vert bouteille du blé,
Ce patchwork de couleurs contrastant avec le marron ou le rouge des terres labourées,
Face à des forêts et bocages aux feuilles naissantes du vert tendre au brun léger.
Au détour d’une haie quelle merveille d’apercevoir une chevrette à bosses avec son faon,
Inquiète au moindre bruit elle déguste ses feuilles de betteraves, un tableau attendrissant,
C’est la saison de « Autant en emporte le vent » nos muqueuses sont au supplice par le pollen,
En Aquitaine les cônes mâles des pins libèrent leur poussière de vie en poudre jaune d’Eden.
Dans la forêt on croise aussi l’impressionnante file indienne des processionnaires chenillées,
Brunes avec des tâches orangées recouvertes d’un million de poils très urticants,
Elles descendent en file du tronc des pins quittant leur abri de soie au printemps,
Puis serpentent au sol pour aller se nymphoser sous terre et pondre tout l’été.
En Mai verdit le blé
Et chante le geai
L’ ARIÉ…JOIE