Page 3 - Livre les Déracinés de la Réunion -Version Démo- Oeuvre de Guy Pujol & Jean-Charles Poitou
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Récit d’enfants exilés
« Oté gran La France, twé la fé mal amoin », écrivait le chantre du maloya
Danyèl Waro, en référence à son exil forcé.
C’est en 1963 que je suis arrivé dans le Cantal, où nous
sommes restés pendant 4 ans.
Ensuite c’est à Capdenac dans l’Aveyron où nous avons vécu.
Nous y sommes restés avant d’être à nouveau séparés avec
mon frère Jean-Paul et je suis resté seul un an.
J’avais 10 ans et que de mauvais souvenirs dans ces pensions
où je devais ramasser les châtaignes, le maïs, les glands pour
les cochons, nourrir les vaches, les lapins et les cochons.
Quand je faisais pipi au lit on venait me chercher pour
prendre une douche froide et me piquer avec des orties.
Quelles bonnes pratiques pour ces pensions religieuses !
A partir de 11 ans je suis parti en famille d’accueil dans
le Limousin en faisant toujours partie de la maison d’enfance
de Quézac et j’ai retrouvé mon frère.
Mais malheureusement 3 ans après tout ne s’est pas bien
passé entre la famille d’accueil et mon frère qui avait 17 ans,
on nous a encore séparés.
Après de longues années j’ai appris ce que notre famille
d’accueil avait fait à mon frère.
Aujourd’hui j’ai 59 ans et j’ai perdu mon île natale, ma
langue maternelle et surtout mon frère que je n’ai plus revu,
il avait regagné La Réunion et aujourd’hui il n’est plus de ce
monde.